MEAN STREETS

(LES RUES CHAUDES)

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Drame de moeurs

1973. Réalisation: Martin Scorsese. Avec: Harvey Keitel, Robert De Niro, David Proval et Amy Robinson. Scénario: Martin Scorsese et Mardik Martin. Couleur/1h50.

        Mean Streets est simplement l'histoire d'une bande de gangsters dans un quartier italien de New York. C'est également l'histoire d'un jeune criminel qui essaie de trouver la paix intérieure malgré le fait qu'il s'associe avec des gens dangereux. Né dans un quartier de durs à cuire à Queens New York, le réalisateur Martin Scorsese a toujours réalisé des films qui reflètent ce qu'il a déjà vécu. Son style est à la fois réaliste et sensationnel, et Mean Streets se situe dans ces quartiers périlleux où la violence est dominante (mais l'ironie est que le film fut tourné en grande partie à Los Angeles, pas à New York). 

      Avant 1973, Scorsese n'avait réalisé que quelques films, dont Boxcar Bertha (1972) et Who's That Knocking at My Door (1968). En fait, Mean Streets est considéré comme étant une suite à Who's That Knocking at My Door. Scorsese accentue encore une fois la vie des criminels et les rues effrayantes de New York. Toutefois, Mean Streets semble passé date maintenant et j'irais même jusqu'à déclarer que ce film n'est pas bon. 

        Le personnage Charlie Kappa (Keitel) est intrigant. On peut entendre ses pensées et on voit son côté spirituel. Sa chimie avec son copain cinglé Johnny Boy nous procure plusieurs bons moments, et Charlie s'éprend de la cousine de Johnny Boy. Malheureusement, les gros manitous de la mafia n'approuvent pas du tout le comportement de Johnny ni la relation entre Charlie et la cousine. Ces conflits attirent notre attention et l'interprétation de Keitel est tout à fait convaincante. En fait, ce n'est pas ce qu'il y a dans Mean Streets qui est décevant mais ce qu'il n'y a pas. Pour un film qui traite de la mafia, ce drame de Scorsese manque d'autres thèmes plus profonds et prenants. Les tribulations de Charlie et Johnny restent au niveau d'un petit téléroman: il y a une relation amoureuse, un comportement violent de la part des gangsters, mais l'histoire ne va jamais plus loin. Par exemple, si la cousine de Johnny se faisait fusiller et Charlie était pris entre son désir de vengeance et son implication dans la mafia, le scénario serait puissant. Le scénario serait également meilleur si Johnny Boy était étudié en profondeur et non seulement perçu comme un cinglé à la gâchette nerveuse. On voit que Johnny Boy est difficile à contrôler, mais qui est-il réellement ? Quelles sont ses croyances et ses valeurs ? Est-ce qu'elles ressemblent à celles de Charlie ? Le film reste très limité.

        Les scènes qui mettent l'accent sur ce gangster (celui à qui Johnny doit de l'argent) sont répétitives et semblent être la seule représentation d'un règlement de compte. Tout le scénario reste fixé sur ce point et n'ose pas s'aventurer vers d'autres aspects de la mafia. Je pense d'ailleurs à Goodfellas/Les Affranchis (1990) de Scorsese, un excellent exemple d'un film profond qui explore tous les petits coins sombres de la vie criminelle. Les personnages de Ray Liotta, Robert De Niro et Joe Pesci sont étudiés en profondeur, à un tel point que Goodfellas brime de réalisme. Les personnages dans Mean Streets sont plus symboliques, même s'ils sont intéressants. Après avoir vu Goodfellas, on a l'impression d'avoir vécu dans la mafia pendant quelques heures. Après avoir vu Mean Streets, j'ai pensé avoir lu un simple article dans le journal. Mean Streets ressemble à un film amateur réalisé par un étudiant de cinéma trop zélé. 

        Certains diront que c'est injuste de ma part de comparer Mean Streets, un film réalisé en 1973, à Goodfellas (qui a été filmé lorsque le réalisateur était plus expérimenté). Mais la critique c'est de la critique. Mean Streets n'est pas une perte de temps totale, mais il ne va pas assez loin. Sans être un bain de sang brutal, le film aurait nécessité un peu plus de violence pour nous dépeindre la vie dure de ces criminels. La fin nous montre une fusillade intense, mais le film se termine de façon incomplète.

        Pour l'époque, ce long-métrage a eu un impact remarquable. Plusieurs critiques américains ont déclaré que Mean Streets était un chef d'oeuvre, donc ce n'est qu'une question de goût. Martin Scorsese est un cinéaste de talent et il a fortement influencé le cinéma américain. Toutefois, son Mean Streets désire tout nous dévoiler et finit par dévoiler très peu; il ne montre que le superficiel et ne réussit pas à pénétrer dans le monde complexe et hypocrite de la mafia. En 1990, Scorsese se reprend en réalisant Goodfellas, un film de gangsters qui ne se limite à rien et nous lance le tout sans hésitation.

Affiche du film

Bande-annonce du film (sur Internet Movie Database)

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