ENEMY
(ENNEMI)

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Suspense psychologique

2013. Réalisation: Denis Villeneuve. Avec: Jake Gyllenhaal, Mélanie Laurent, Sarah Gadon et Isabella Rossellini. Scénario: Javier Gullón. Couleur/1h30.

       Un  professeur  d'université de Toronto (Gyllenhaal) mène une existence routinière sans grandes surprises. Il ne semble avoir aucune grande passion pour grand chose. Il décide de louer un film pour se changer les idées et découvre qu'il existe un acteur qui lui ressemble exactement. Intrigué par ce mystérieux sosie, il décide d'entrer en contact avec ce comédien.

       Ce qui s'ensuit est un mélange plus ou moins bien monté de suspense et de tournures. Tiré du roman de José Saramago, Enemy contient quelques éléments captivants entourés d'un lourd silence (il y a très peu de trame sonore). Pendant les trente premières minutes du film, il est très difficile de s'embarquer dans l'histoire, mais une fois que le prof timide commence à communiquer plus régulièrement avec son sosie, le film devient plus intrigant. J'ai souvent pensé à ces vieux épisodes de Twilight Zone dans lesquels des gens ordinaires voient leur vie changée par des événements surnaturels ou inexpliqués. On se demande: est-ce que les deux hommes dans Enemy font partie d'une expérimentation scientifique ? Est-ce une hallucination ? J'ai aussi pensé à The Machinist, un bien meilleur film dans lequel la réalité du protagoniste semble continuellement changée et comme spectateur on se trouve dans un gros casse-tête psychologique.

       Mais au moins dans The Machinist, on offre plus d'explications plausibles au spectateur et à la fin on peut admirer l'ingéniosité du scénario. Le problème dans Enemy est le fait qu'on nous présente toutes sortes de questions et on les met de côté pendant presque toute la durée du film, en espérant une conclusion qui expliquera la réalité de cette situation, mais enfin il n'y a jamais cette lumière qui s'allume où on se dit: «Ah, voila! Maintenant je comprends». Le film se termine avec une métaphore ridicule, et on réalise qu'on s'est fait avoir. Par curiosité, j'ai fait un peu de recherche sur l'Internet pour voir comment les gens interprètent toute cette histoire (et le rapport de cette araignée). Certains pensent que les deux belles femmes dans le scénario n'ont jamais vraiment existé (Mélanie Laurent et Sarah Gadon), d'autres pensent que l'accident d'auto vers la fin symbolise la mort de l'alter ego plus agressif et dominant. Il y a une tonne d'explications. Mais le résultat est le même: à la fin, on se fait fermer la porte au visage et on n'en sait pas plus qu'au début du film.

       Denis Villeneuve, un cinéaste québécois qui s'est fait connaître en réalisant Polytechnique et Incendies, dirige bien les comédiens et Jake Gyllenhaal est convaincant dans le rôle du jeune homme qui ne comprend pas ce qui lui arrive. Cependant, même les films aux métaphores complexes nous doivent un minimum d'explications. Il y a une fine ligne entre la manipulation et la capacité d'intriguer ceux et celles qui regardent le film. Enemy nous présente une idée très originale mais ne l'approfondit pas suffisamment.

Genie 2014: Meilleure cinématographie, réalisation, mise en scène, musique, actrice secondaire (Sarah Gadon).

Affiche du film

Bande-annonce (sur Internet Movie Database)

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