THE IRISHMAN
(L'IRLANDAIS)

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Drame de moeurs
2019. Réalisation: Martin Scorsese. Avec: Robert De Niro, Joe Pesci, Al Pacino et Anna Paquin. Scénario: Steven Zaillian. Couleur/3h30.

Frank Sheeran (De Niro), un homme âgé, est maintenant en chaise roulante dans une résidence pour aînés. Il se remémore son passé et le travail qu'il a fait pour la pègre. En Philadelphie lors des années 50, il travaillait comme camionneur et livrait une partie de sa marchandise au gangster Skinny Razor (Bobby Cannavale). Frank a commencé éventuellement à travailler pour le mafioso local Bufalino (Pesci). En cours de route, Bufalino a présenté Frank au président syndical Jimmy Hoffa (Pacino). Frank est devenu le garde du corps de Hoffa et les deux se sont liés d'amitié. Mais le caractère imprévisible de Hoffa ainsi que les problèmes qu'il pouvait causer ont fini par ternir son image, et les mafiosi ont commencé à en avoir assez.

Basé sur le fait vécu de Frank "The Irishman" Sheeran et le livre I Heard You Paint Houses de Charles Brandt, ce film est très long mais on ne s'ennuie jamais pour une seconde. The Irishman est plus lourd et cérébral que les films précédents de Martin Scorsese et ne contient pas autant d'humour noir et cynique.
Après le succès phénoménal de Goodfellas/Les Affranchis (1990), Scorsese nous présente un chef-d'oeuvre saisissant, inoubliable et également très personnel. Lorsqu'on voit les problèmes de santé de Bufalino vers la fin, et comment les personnages vieillissent, j'ai l'impression que Scorsese fait face à sa propre mortalité et celle des comédiens avec qui il travaille depuis des années (De Niro, Pesci, etc.) Le jeu convaincant de tous les interprètes, surtout d'Al Pacino qui est à son meilleur, fait de ce film un des meilleurs drames de gangsters jamais réalisés. Les détails historiques (l'assassinat de Kennedy, les petits détails des années 50 et 60, etc.) sont en plein dans le mille. Malgré la présence de De Niro et Pesci, qu'on a vus dans Goodfellas et Casino, on ne sent jamais que Scorsese se répète ou recycle de vieilles idées. Le tout semble original tout en débordant d'humanité et de réflexion. Scorsese n'a pas perdu sa maîtrise incomparable du langage filmique et son projet est d'une étonnante résonance.

Un gros bravo à Anna Paquin aussi, moins expérimentée que les autres comédiens qui l'entourent, mais aussi convaincante. Elle joue la fille de Frank qui a perdu toute confiance en lui. Joe Pesci force l'admiration dans le rôle du mafioso. Je m'attendais toujours que son Bufalino abatte tout le monde comme le personnage cinglé Tommy De Vito dans Goodfellas, mais Bufalino dégage plus de calme et de profondeur que Tommy. Ray Romano est excellent dans le rôle de Bill, l'avocat syndical. On ne peut pas se tromper avec une distribution aussi prometteuse.

Comme dans les autres films du genre, on assiste aux règlements de compte et aux meurtres, rien de nouveau. La violence dans The Irishman est un peu moins extrême que dans les films précédents de Scorsese. Les meurtres sont exécutés de manière froide et impersonnelle; comme on dit en anglais, "it's just business". Mais on voit le tempérament parfois explosif de Frank, qui donne une raclée à un épicier pour avoir maltraité sa fille. Comme dans tous les films de Scorsese, les personnages sont imparfaits, poussés par leurs impulsions et reçoivent une conséquence pour leurs actions.

La fin est plus émouvante que ce qu'on voit dans les films précédents de Scorsese, les scènes finales sont une méditation profonde sur la vie de gangsters et la vieillesse. C'est comme si on disait un dernier adieu aux Tommy De Vito et Frank Sheeran de ses films. Les réflexions finales de Frank sont d'une étonnante profondeur.

The Irishman demande beaucoup de patience et d'attention, on peut manquer des détails si on est facilement distraits. Avant de le voir, je pensais que j'avais vu assez de gangsters dans les films et que j'en avais fait une indigestion. Mais ce film redonne vie à un genre très usé au cinéma. Il nous fait réaliser que malgré leur âge, Scorsese, De Niro, Pesci, Harvey Keitel et Pacino ont encore assez d'énergie et de talent pour marquer le cinéma américain pour toujours. C'est du cinéma exemplaire.

Affiche du film
Bande-annonce
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