DEATH WISH
(UN JUSTICIER DANS LA VILLE)

«««

Drame policier
1974. Réalisation: Michael Winner. Avec: Charles Bronson, Hope Lange, Vincent Gardenia et Steven Keats. Scénario: Wendell Mayes. Couleur/1h33.

À New York, l'architecte pacifique Paul Kersey (Bronson) voit sa vie bouleversée. Lorsqu'il est au travail, sa femme Joanna (Lange) et sa fille Carol sont attaquées par des voyous lorsqu'elles reviennent de faire l'épicerie. Les trois malfrats entrent par effraction dans l'appartement de Paul, violent Carol et battent Joanna à mort. Accablé de chagrin, Paul voit aussi la santé mentale de sa fille se détériorer et elle demeure dans un état presque catatonique. Lorsque Paul se rend en Arizona afin de travailler sur un projet de développement résidentiel, son client Jainchill l'invite à souper au restaurant de son club de tir. Par après, Jainchill voit Paul utiliser un des armes à feu dans la salle de tir. Jainchill est impressionné par ce qu'il voit. Il donne un revolver à Paul comme cadeau pour son travail sur leur projet. De retour à New York, Paul apprend que sa fille Carol devra être placée dans un hôpital psychiatrique. Un soir, Paul décide de faire une promenade dans les rues de Manhattan et se fait agresser par un voleur armé. Paul l'abat avec son nouveau revolver, et ce n'est que le début ...

Cette adaptation du roman de Brian Garfield peut sembler gratuitement violente, tout en glorifiant la justice faite par soi-même, mais le film demeure d'une rare efficacité et observe de manière incisive le problème de violence urbaine. On sait que l'utilisation des armes à feu a toujours été un sujet brûlant pour les Américains, et le scénario fait un commentaire sur l'utilisation des fusils afin de se défendre. À l'époque du film Death Wish (et du roman paru en 1972), Richard Nixon était président et une de ses politiques de "la loi et l'ordre" prônaient les sentences plus sévères pour les criminels. Apparemment, les meurtres et autres crimes contre la personne ont augmenté vers la fin des années 60 et début 70. Il est possible que le cinéma de cette époque illustrait la peur grandissante des citoyens pour leur propre sécurité. Dirty Harry/L'Inspecteur Harry, sorti en 1971, aborde ce thème de justice plus drastique, ainsi que sa suite Magnum Force/À coups de Magnum (1973). Maintenant on a Death Wish, qui cible cette peur des voyous et criminels armés qui sont une menace constante pour les citoyens urbains. Paul Kersey représente la "loi et l'ordre" qui dépasse les bornes.

Les scènes les plus troublantes sont celles qui insinuent que ça devient de plus en plus facile de tuer après l'avoir fait plus qu'une fois. La première fois que Paul abat un voleur armé, il arrive à la maison et vomit, visiblement secoué par ce qu'il a vécu. Par après, ça devient presque une obsession qu'il se promène seul armé de son revolver, en attendant des criminels qui apparaissent subitement. D'un côté, c'est comme un fantasme de violence où Paul applique sa propre justice. D'un autre côté, ça montre comment un citadin normal et pacifique peut devenir de plus en plus violent si on l'expose à des agressions constantes. Une des conversations intéressantes du film est celle où Paul discute avec son gendre Jack de ce qui va arriver à Carol. Jack mentionne que les gens sont plus civilisés maintenant, en conséquence moins habitués à devoir se défendre de manière primitive. D'une certaine manière, Paul a régressé comme personne puisqu'il est devenu plus primitif, la ville de New York est comme une jungle où ce sont les plus forts qui réussissent à survivre. Paul n'est plus la même personne vers la fin du film, et ce changement fascinant nous montre l'effet pervers de la violence et de l'utilisation des armes à feu. Est-ce que cette violence est la solution ou le problème ? Death Wish n'offre aucune réponse claire et ne fait pas la morale. Puisque Paul ne rencontre jamais les voyous qui ont attaqué sa famille, le récit ne devient jamais une simple histoire de vengeance, ce qui aurait été trop artificiel. Bronson, aussi connu pour ses rôles machos dans les films très masculins comme The Dirty Dozen/Douze Salopards (1967) et Il était une fois dans l'ouest (1968), semble plus tendre et inoffensif vers le début du film, ce qui rend sa transformation encore plus effrayante. Il n'exprime pas beaucoup d'émotions, mais on peut s'identifier à son personnage. Au début, Paul semble croire que la criminalité est causée par la pauvreté. Son attitude est très libérale, ce qui est un constraste avec la violence extrême de son personnage vers la fin. On peut se demander: est-ce que la société et la justice vont dans cette direction ?

La réalisation compétente de Michael Winner maîtrise très bien les fusillades et le suspense. La photographie illustre efficacement les rues sombres de Manhattan où n'importe quel loubard peut attaquer. La scène d'agression de Carol et Joanna est crue et choquante (c'est bel et bien Jeff Goldblum, plus connu maintenant, qui joue un des voyous). On dirait qu'au début des années 70, le cinéma a poussé les limites de la violence, surtout pour ce qui a trait au viol. On pense notamment à Straw Dogs/Les Chiens de paille (1971), A Clockwork Orange/Orange mécanique (1971) et Deliverance/Délivrance (1972), où le viol est l'un des thèmes dominants des scénarios.

Death Wish mélange bien le commentaire social et le thriller. On ne glorifie pas la violence mais ce film nous fait réfléchir à l'état actuel des grandes villes et des lois sur les armes à feu. Même de nos jours, ce drame demeure pertinent. Il y a eu plusieurs suites (Death Wish II, III, etc, etc), que je n'ai jamais vues, mais qui ont été considérées excessives et de mauvais goût par plusieurs critiques. Celui-ci est considéré le meilleur de la série, et la fin satisfaisante peut donner des frissons. Bien réussi.
Affiche du film

RETOUR AU MENU